Avec l’accroissement constant du volume des transactions, l’Afrique subsaharienne est devenue en août 2021, la région qui a acquis le plus de crypto-monnaies, passant devant l’Amérique du Nord selon Useful Tulips, une entreprise spécialisée dans l’analyse de ce marché. Les acquisitions subsahariennes étaient supérieures de 50 % aux volumes en Asie-Pacifique et représentent trois fois celles de l’Amérique latine et deux fois les acquisitions de l’ensemble des autres pays du monde réunis.
Selon la même source, 42 % des Nigérians sondés en 2021 par le site spécialisé Statista ont indiqué avoir déjà eu recours à la crypto-monnaie, contre 8 % aux États-Unis, 7 % en Chine et 5 % en France.
Cette évolution diversement appréciée par les États du continent reste néanmoins très peu encadrée.
Les Crypto-monnaies les plus utilisées en Afrique
Cette nouvelle technologie monétaire n’est pas limitée géographiquement car elle est basée sur Internet. En Afrique, l’adoption des crypto-monnaies s’accroit au fil du temps et ces dernières ne cessent de gagner en popularité dans plusieurs pays du continent.
Parmi les crypto-monnaies les plus connues, on retrouve le Bitcoin, l’Ethereum, le Litecoin, le XRP, le Cardano, l’EOS, le Monero, etc… Mais, c’est le Bitcoin qui reste en tête du marché en Afrique et dans le monde.
Niveau d’adoption des crypto-monnaies en Afrique
Chainalysis (une société d’analyse blockchain), dans son rapport « the 2021 Chainalysis Global Crypto Adoption Index », a publié son classement 2021 des 20 pays du monde entier dont les communautés ont le plus adopté des crypto-monnaies. Les 5 nations africaines qui sortent du lot sont respectivement le Kenya, le Nigeria, le Togo, l’Afrique du Sud et le Ghana.
Quid de la légalité des crypto-monnaies dans le système monétaire africain?
Le continent africain enregistre l’une des plus fortes croissances concernant les crypto-monnaies. L’Afrique bat également des records en termes d’adoption, de transfert de détail et d’utilisation de plateformes peer-to-peer (P2P).
La Chainalysis a révélé, en septembre 2021, une augmentation de plus de 1 200 % du marché des crypto-monnaies en Afrique en se basant sur la valeur reçue de ces dernières en 2020. Le continent se place à la 3ème place en termes de croissance la plus rapide pour les crypto-monnaies malgré les inquiétudes et les réglementations strictes existant dans différents pays. Il est important de noter qu’aucun pays africain ne reconnaît aux crypto-monnaies le statut de monnaie légale.
Le besoin de réglementation est lié au besoin de confiance. Les pays africains semblent unanimes pour dire que les crypto-monnaies ne sont pas des monnaies légales du fait que ces actifs numériques ne sont pas émis par leur soin ou par une banque centrale. Les autorités estiment que les crypto-monnaies soulèvent des questions de transparence car, même si les transactions réalisées en crypto-monnaies sont enregistrées dans un registre public favorisant leur traçabilité, la capacité d’anonymisation offerte dans le cadre de ces transactions peut favoriser le développement d’activités illicites du fait que lesdites transactions ne permettent pas de répondre aux obligations en matière de connaissance du donneur d’ordre et du bénéficiaire. Les pays comme le Maroc, la Zambie, l’Algérie, la Libye, le Nigeria, le Lesotho, l’Egypte, le Zimbabwe, la Namibie ont interdit à tout organisme bancaire et financier agréé de proposer ou de faciliter les transactions en crypto-monnaies. D’autres pays préfèrent garder leurs distances avec le secteur des crypto-monnaies. A titre d’exemple, le Kenya avertit ses citoyens du manque du cours légal des crypto-monnaies et n’offre donc aucune protection pour toute défaillance pouvant apparaître dans les affaires de crypto- monnaie.
Même si les banques centrales des pays (en Afrique comme ailleurs dans le monde sont méfiantes envers les crypto-monnaies, il y a celles qui sont prêtes à tenter l’expérience. C’est le cas de la banque centrale du Nigeria avec le lancement de sa crypto-devise, le naira électronique ou « e-naira ».
Les défis de la crypto-monnaie en Afrique
Parmi les défis à relever, citons-le manque d’internet fiable et abordable ainsi que le manque de culture numérique en particulier dans les zones rurales.
Étant donné que la crypto-monnaie utilise Internet pour les transactions et que la pénétration de l’internet est encore faible en Afrique, les utilisateurs potentiels auront encore du mal à échanger des crypto-monnaies. Toutefois, on commence à s’intéresser de plus en plus à la transmission de paiements cryptés sans connexion Internet à l’exemple d’un réseau satellite à couverture mondiale qui diffuse gratuitement le réseau Bitcoin créé par Blockstream leader dans le développement d’applications en lien avec le Bitcoin et la technologie blockchain.
On peut citer également comme défis, le manque ou le faible niveau de la culture et des connaissances financières sans oublier la résistance des régulateurs qui est aussi l’un des plus grands défis en Afrique.
La crypto-monnaie n’est pas seulement une solution pour le sort des « non bancarisés ». Au contraire, c’est une méthode pour permettre à la population de contrôler économiquement sa propre richesse. La nature intangible des monnaies numériques signifie qu’un gouvernement ne peut pas retirer physiquement la richesse d’un citoyen. L’adoption réussie de mobile money en Afrique peut être soit, un bon point de départ pour qu’un citoyen comprenne et adopte la crypto-monnaie, soit être une zone de confort pour le citoyen qui veut commencer le commerce numérique tout en refusant les nouvelles technologies.
Alors, pourquoi les pays africains continueraient-elles à adopter la crypto-monnaie malgré ses difficultés ?
L’instabilité économique en Afrique est l’une des raisons pour lesquelles les Africains passent à la crypto-monnaie. Cela peut s’expliquer essentiellement par une volonté des citoyens de protéger leurs revenus et leur épargne face aux dévaluations des monnaies locales
L’argent échangé n’est pas affecté par les taux d’inflation d’un seul pays. Ce penchant pour la crypto-monnaie peut donc s’expliquer, d’un côté, par une intention d’acheter et de vendre des biens et services en étant moins impactés par l’inflation et, de l’autre, par la volonté d’envoyer et de recevoir des fonds depuis l’étranger à moindre coût et en toute sécurité. En outre, les transactions en crypto-monnaie sont rapides et moins couteuses grâce à l’absence des intermédiaires.
Alors que les services de mobile money, dont l’adoption est bien réussie en Afrique, reposent sur un modèle commercial centralisé pour fonctionner, en appliquant des frais pesant sur les revenus des clients, la crypto-monnaie est décentralisée et peut offrir des transactions presque gratuites.
Le faible taux de bancarisation face à la forte pénétration du numérique et la perte de confiance à l’égard des institutions publiques peuvent également pousser les populations à se tourner vers les crypto-monnaies.
Les crypto-monnaie utilisent une technologie de blockchain qui stocke les documents publics dans un système décentralisé, ce qui signifie que les transactions ne peuvent pas être interdites à partir d’un seul pays. Ainsi, l’interdiction de la crypto-monnaie par le gouvernement ne peut pas arrêter les transactions en ligne de monnaie virtuelle.
Médiatrice Nkurunziza